3. Le pastel au coeur du système économique occitan
Albi, pôle commercial au XIVème
Au XIVème, le pôle commercial est alors Albi.
Un des premiers problèmes posés à la commercialisation du pastel résulte de l'inégalité entre la très bonne qualité de la teinture obtenue dans les plaines du Lauragais et de l'Albigeois, et la qualité médiocre des tissus de lin produits dans la région (Mazamet, Toulouse, Carcassonne.) Ces villes ne peuvent en aucun cas rivaliser avec les tissus anglais ou flamands à cette époque.
Le pastel est acheminé dans toutes les directions
Ainsi le pastel doit être obligatoirement exporté vers ces centres de production textile. Le pastel est acheminé par chars à boeufs dans toutes les directions, notamment vers la cité auvergnate de Mors-la-Jolie, le lyonnais, la France du Nord et au Sud vers Narbonne pour l'Italie et l'Espagne.
L'essentiel du marché est contrôlé par Orthez dans le Béarn : le plus gros de la production part vers l'Espagne via Tarbes, Oloron et le col du Somport. L'autre partie est dirigée vers l'Angleterre et les Flandres via Bayonne.
Montée en puissance de Toulouse au XVème
Au XVème siècle, Toulouse va apparaître sur le marché pastelier. Cette montée en puissance est favorisée par la conjonction de plusieurs facteurs :
- le manque de capitaux et de disponibilité financière des marchands béarnais et albigeois
- l'organisation de la filière : les collecteurs achètent la récolte en feuilles, fabriquent et vendent la teinture aux marchands qui la commercialisent
- du fait de la concurrence, les collecteurs prennent le risque d'acheter souvent avant la récolte, pariant ainsi sur un avenir hasardeux en raison des conditions climatiques. En outre, ils paient tôt une récolte qui ne sera vendue que plusieurs mois plus tard à des clients étrangers.
- le mode de paiement de l'époque, du fait de l'insécurité des routes, est la lettre de change; or toute transaction par ce mode passe par Lyon.
Dans ce contexte, l'essor de Toulouse s'appuie sur la qualité de sa structure bancaire : à titre indicatif, à la fin de la période noire qu'est la fin du Moyen Age pour la région, Toulouse dispose malgré tout de 30 "changeurs", rivalisant ainsi avec Lyon dans ce domaine.
La distribution du Pastel : une organisation complexe
" Au pays de Cocagne, plus on dort, plus on gagne" mais seul le pastel se repose, tout autour de lui on se presse et des métiers spécifiques apparaissent. Nous retenons ici les principaux.
- Les collecteurs sillonnent les régions productives pour réserver sur pied les futures récoltes.
- Les transporteurs : réservés à l'avance, ils mènent les lots de pastel dans leurs charrettes à Toulouse où se tient dès le début de l'été la grande foire au pastel.
- Les teinturiers estiment la longueur de tissu que chaque lot pourra teindre et valident ou infirment le prix.
- Les emballeurs mettent les lots de pastel dans des sacs de toile brune, les ficellent, marquent à la main des signes de propriété.
Le quai de la Daurade à Toulouse foisonne de gabarres, barques à fond plat, partant à Bordeaux ou en revenant. Depuis Bordeaux, les grands navires marchands livreront le précieux chargement à destination des grandes villes européennes.
Quai de la Daurade hier...
... Quai de la Daurade aujourd'hui
Gabarre à fond plat
Les Hôtels : Palais des marchands pastelliers
Toulouse a dû faire face tout au long du XIVème siècle à de nombreux incendies et en 1358 à une terrible épidémie de peste.
Elle sort épuisée de la guerre de Cent ans mais grâce à la fortune de plusieurs générations de grandes familles issues du pastel, la ville se pare de véritables palais.
Nulle part ailleurs, en France, on ne recense autant d'hôtels particuliers. C'est pour une période de près de 100 ans, entre 1450 et 1560, " l'âge d'or du pastel "et l'épanouissement de la Renaissance toulousaine.
Parmi eux, deux bâtiments se distinguent, les hôtels de Bernuy et d'Assézat.
L'Hôtel de Bernuy possède une tour hexagonale la plus haute de Toulouse. Percée de 7 fenêtres, elle s'achève par une terrasse décorée de gargouilles. Elle est l'emblème de la réussite de son propriétaire.
Hôtel de Bernuy (Toulouse)
Hôtel de Bernuy, seconde cour, tour d’escalier.
Hôtel de Bernuy, cour d’honneur, voûte surbaissée.
Hôtel de Bernuy, cour d’honneur, entrée principale (côté cour).
La plus belle résidence privée toulousaine est sans aucun doute l'hôtel d'Assézat. Elle symbolise à elle seule la puissance, la fortune des "princes du pastel".
L’architecte a suivi pour l’édification du palais une conception architecturale identique à celle adoptée dans le même temps pour la cour carrée du Louvre à Paris : superposition sur trois étages des trois ordres d’architecture, dorique, ionique et corinthien.
Pierre d'Assézat étendait ses cultures dans tout le triangle d'or, mais c'est au port de la Daurade, non loin de là, qu'il vendait ses productions. Devenu capitoul , Pierre d'Assézat fut anobli, et gagna sa particule.
Si le commerce fit la fortune des marchands pastelliers de Toulouse, ("Cité Bleue" à cette époque, "Ville Rose" de nos jours) et de sa région pendant plus d'un siècle (1450-1561), l'horizon va s'assombrit.
Hôtel Assézat (Toulouse)
Cour d'honneur
Cour intérieure
Les arcades sur le côté méridional de la cour de l'hôtel d'Assézat.
Découvrez d'autres Hôtels particuliers de la Ville rose dans
mon album photos.
Les Hôtels particuliers de Toulouse.
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